mardi 20 mai 2014

Le train train...

Petit signe de vie quand même... Entre les creux de vagues, les cycles qui se ressemblent, l'ambiance tendue à la maison, et bien on a pas toujours le coeur à écrire. Le temps s'étire, malgré tout. Et le train-train quotidien nous force à avancer. Un pas après l'autre.

Dernière nouvelle du front : notre rendez-vous au CECOS de Strasbourg a été avancé au 10 juin. Une semaine de moins à patienter donc. Reste donc environ 3 semaines. J'en ai donc profité pour reparler de la situation à l'Homme. Depuis son pétage de plomb, je n'avais pas trop insisté et n'étais pas réellement revenue sur son état d'esprit et ses choix. La discussion a plutôt bien commencé, puisque l'Homme m'a d'abord expliqué que, depuis le dernier rendez-vous, il n'avait tout simplement plus pensé à ces histoires. Il a fait une sorte de trou spatio-temporel, où seuls les travaux de la maison et la vie quotidienne étaient autorisés à entrer dans sa tête. Il m'a redit qu'il était partant pour le don, malgré le fait que la longueur de la procédure le rebute. Je lui ai expliqué qu'il devait être sûr de son choix, car, bien que je lui ai dit que c'était lui qui aurait le dernier mot, je ne souhaitais pas débuter tous les examens médicaux par lesquels je vais être obligée de passer, et me faire piquer les fesses aux hormones, pour qu'il m'annonce dans 6 mois qu'il a changé d'avis. Il a ri un peu sur la forme et m'a juré que sur le fond, il était partant, pour n'avoir aucun regret. La paternité, c'est son truc. Et il a envie de vivre la grossesse, l'accouchement et les nuits blanches de son futur bébé.

Là où la conversation a commencé à virer au vinaigre, c'est quand je l'ai relancé sur le sujet de l'annonce à la famille. Il a longuement hésité, a tourné 18 fois autour du pot, pour finir par me demander du bout des lèvres si ça me dérangeait qu'il ne l'annonce qu'à sa mère (qui ferait le relais auprès de son père), et qu'il soit seul en tête avec elle. C'est bête mais ça m'a fait mal. Je me suis sentie rejettée, exclue, bref, une moins que rien sans importance. J'ai boudé pendant quelques jours. Maintenant, je me dis que l'essentiel est bien qu'il puisse en parler à ses proches. D'une façon ou d'une autre. Si ça doit être sans moi ce sera sans moi. Mais il faut que ça sorte ! Et depuis, et bien, le train train a repris. Voiture en panne, enfants chez le médecin, plantations au jardin...

Côté cycle, je suis à J13, j'ai très mal aux ovaires, comme d'hab. Ma température fait des vagues, à tel point que Fertility Friend m'a déjà détecté une ovulation à J10. On est tombé sur la tête ! D'autant que ce n'est pas le cas de Mamanandco, et que j'ai eu les glaires blanc d'oeuf, après la soi-disant ovulation ! Au moins, ça fait passer le temps...

lundi 12 mai 2014

Bienvenue en Sibérie

Bon, bon, bon...

L'ambiance est froide et pesante à la maison. Les non-dits me pourrissent la vie. Depuis l'arrivée des règles, l'Homme oscille entre poussées de mauvaise humeur et mutisme. Je lutte de toutes mes forces pour ravaler mes questions et du coup, mon moral en a pris un coup ces derniers jours... Il y aura des jours meilleurs. Mais c'est difficile de gérer la colère et la tristesse de mon homme et mes propres questionnements...

J5 et les règles sont toujours là. La prise de température a été inexistante ce week-end. Pas motivée. Après tout, pendant cette période, c'est un peu moins important. Par contre, cette fois-ci, je suis contente, car je n'ai pas de douleurs particulières. Ça me change. On prend le positif là où on peut...

J'ai enfin trouvé un avantage à l'attente jusqu'au prochain rendez-vous : mes pensées se focalisent sur autre chose. Boulot, enfants, travaux, démarches administratives. Tout est bon pour me faire sortir de cette démarche médicalisée, où je serai transformée en malade sans l'être. Le 17 juin reste dans un coin de ma tête, mais au moins, ce n'est pas ma préoccupation principale. Je m'occupe en faisant des petites choses anodines. J'ai aménagé l'aquarium de Première ce week-end. Je me suis fais plaisir. J'ai acheté plein de belles plantes aquatiques, je les ai planté, j'ai réorganisé les décors. Et je suis restée devant l'aquarium pendant des heures dans la chambre vide. Ça fait du bien d'avoir la tête entièrement vidée !

Je continue de travailler ma patience. J'ai au moins essayé de faire parler l'Homme 4 fois ce week-end. Chaque fois j'ai réussi à ravaler et me taire, pour le laisser continuer à digérer. Quand je fais des allusions à un futur bébé, il ne monte pas sur ses grands chevaux, ni enthousiaste, ni déprimé, ni en colère. Rien. Et c'est surement cet espèce de détachement qui m'inquiète... Mais j'essaye de me calmer, car, c'est bien connu, les hommes ne partagent pas facilement. Surtout quand ça touche à leur virilité.

Patience, patience, patience... Et doudoune, le temps que le temps se radoucisse à la maison !

vendredi 9 mai 2014

Vous croyez aux miracles ?

Moi pas. J'en ai espéré à plusieurs reprises dans ma vie. Je n'en ai jamais été ni témoin, ni destinataire. Il faut croire que la liste d'attente est trop longue, ou que je ne suis pas assez croyante pour cela...

C17-J2. Les règles ont débarqué à l'heure, ou quasiment à l'heure. Sans trop de douleurs pour une fois. Sans surprise et sans amertume. Lorsque l'on sait qu'on les aura quoiqu'il arrive, et bien on se résigne comme un bon petit soldat. J'ai renoncé à utiliser le moniteur de fertilité. Je me contente de poursuivre les courbes de température, histoire d'avoir de la matière à fournir aux médecins en temps voulu. Je suis prévoyante. Cela dit, le fait de savoir qu'il y a une pause des rendez-vous médicaux jusqu'à mi-juin aide aussi à penser à autre chose. L'Homme s'est tourné vers les travaux de la maison, moi sur mes enfants.

Mais voilà, la date des règles approchant, on ne peut s'empêcher d'avoir une idée folle qui nous traverse l'esprit. Et si finalement, on avait enfin droit à un miracle ? Et si les règles ne débarquaient pas ? Et si ? Et si ? Et si ? Il y a toujours une infime part de moi qui veut croire que c'est possible. Que peut-être il y a là-haut un Dieu bon et généreux, et non pas cette entité froide et lointaine que j'ai toujours connue. Mais chaque fois c'est la même chose. Alors je continue à porter mon fardeau et à avancer, car c'est ma nature. Je continue à avancer, quoiqu'il arrive. Car c'est la vie. C'est comme ça. Et je ne sais pas me laisser abattre. J'ai constaté que l'Homme est pareil, dans ce sens où il continue d'espérer un miracle. Il continue d'espérer qu'il fabriquera un spermatozoïde, et que ce petit miracle en donnera un autre, une cerise issue de sa chair. Il sait pertinemment que ce n'est pas possible. Mais il ne peut s'empêcher de l'espérer...

Résultat des courses, c'est moi qui ai vu les règles arriver, mais c'est mon chéri qui a récolté de la mauvaise humeur qu'on attribue habituellement aux femmes en période "rouge". D'une humeur de chacal. A donner des ordres sur un ton rogue aux enfants. A me faire des réflexions désagréables et plutôt injuste. Mais bien sûr, quand on lui demande ce qu'il y a et pourquoi est-il aussi méchant, il répond qu'il n'y a rien. Si on insiste, il répond qu'il ne sait pas pourquoi il est comme ça. J'ai failli lui mettre le nez dans sa crotte, mais finalement, j'ai laissé tomber. J'ai préféré dormir. Et après coup, je me dis que j'ai bien fait : après tout, il faut lui laisser que ce sont mes premières règles depuis l'annonce de sa stérilité définitive et de l'impossibilité de concrétiser son rêve le plus cher... Normal qu'il soit de mauvais poil, non ? Moi je le serais aussi. Alors voilà. Patience et amour. Je ne peux rien lui donner d'autre.

lundi 5 mai 2014

Quand il n'y a plus d'espoir

J'ai un peu déserté en raison de quelques jours de vacances... Ça a globalement fait du bien, malgré un temps digne d'un début de mois de mars. Et de notre rendez-vous avec la médecin du CECOS, conseillé par l'urologue de l'Homme. Le rendez-vous s'est plutôt bien passé. La médecin-biologiste semble être une dame extrêmement professionnelle et attentive. Le contenu du rendez-vous, par contre, n'est vraiment pas réjouissant... C'est dur pour moi d'en faire le compte-rendu, et pourtant, il faut bien que je le fasse. Ne serait-ce que parce que j'ai besoin de vider mon sac...

On est arrivé en retard. Il faisait un froid de canard, et, bien malgré moi, je sentais venir les mauvaises nouvelles. Sans vouloir jouer la pessimiste, chaque fois que nous sommes sortis d'un rendez-vous médical ces derniers temps, il y a chaque fois eu une mauvaise nouvelle. Donc, c'est blindée comme un cheval de Troie, que j'ai trotté derrière l'Homme, dans le grand hopital où nous devions rencontrer la biologiste. Il a fallu descendre à l'entre-sol. L'Homme a tout de suite grommelé : "Regarde, on est à l'étage des pestiférés !". Je lui ai pris la main et l'ai serrée. On a été reçu par une secrétaire plutôt aimable, qui a ouvert notre dossier. Un de plus. On a attendu à peine 5 minutes (normal, on avait déjà presque 1/2h de retard), et la médecin est venue nous chercher. Une femme déjà assez âgée. L'ombre de sourire bienveillant. Elle nous a demandé l'autorisation pour qu'un interne assiste à l'entretien.

On s'est installé dans la salle de consultation. Minuscule. Froide. Seul un tableau, affichant des photos de bébés venait un peu illuminer la pièce... Elle nous a donc posé des questions. On lui a expliqué notre historique. Première surprise pour elle : un diagnostic de Klinfelter chez mon homme, passé inaperçu depuis presque 30 ans. Elle était presque furieuse en disant que compte tenu des symptômes physiques visibles, ça aurait dû être dépisté bien avant, lors de contrôles de routine. Voyant mon homme hésitant, je me suis lancée et ai posé la première question, essentielle, qui n'arrivait pas à franchir ses lèvres : serait-il possible de tenter une biopsie testiculaire, et ce, malgré l'avis négatif de l'urologue ? Elle a eu un instant d'hésitation. Et elle nous a expliqué qu'elle nous la déconseillait fortement. A renfort de petits croquis, elle nous a expliqué que, l'Homme, ayant la chance d'avoir un taux de testostérone normal, risquait fort de perdre les cellules qui fabriquent cette hormone mâle, souvent en défaut chez les hommes Klinfelter. Résultat des courses, tout ce qu'il risquerait d'y gagner, c'est un traitement hormonal à vie, avec piqûres tous les 3 mois. Tout ça pour une chance infime, quasi inexistante, de trouver des spermatozoïdes. Elle a un peu tiqué quand je lui ai expliqué qu'il y avait une étude parue dans un journal médical, faisant état d'une quinzaine de bébés nés de biopsie de Klinfelteriens homogènes. Elle nous a dit que ce n'était surement pas une étude française. Et que l'urologue de l'Homme était un professeur émérite et reconnu dans son métier, l'un des deux seuls de la région à faire les fameuses biopsies et que, s'il l'avait déconseillé, il fallait lui faire confiance. J'ai vu les yeux de mon chéri se brouiller et devenir brillants. Les larmes aux bords des yeux. Il a serré les lèvres pourtant. Mais lorsque la médecin a abordé le sujet de la famille, ça a été trop dur. Les parents, les proches, sont-ils au courant de la situation ?

Il a craqué. Il s'est effondré. J'ai posé une main rassurante sur sa nuque. Tout en expliquant au médecin combien c'était dur pour lui d'avouer sa stérilité à ses parents. Elle a hoché la tête en signe de compréhension, car la stérilité masculine est trop souvent associée à l'idée de l'impuissance, mais elle a quand même ajouté que le soutien de la famille proche est très importante dans une démarche de PMA.

Enfin, j'ai appris à cette occasion, pourquoi une procédure d'insémination artificielle avec donneur est si longue. Les dons sont rares. Beaucoup plus rares que ce que j'imaginais. Les critères de sélection étant déjà drastiques (hommes en bonne santé, entre 18 et 45 ans, en couple, avec au moins un enfants en bonne santé et avoir l'accord de la femme, chose quasi impossible, car souvent, pour une femme, que son mari donne son sperme équivaut à une infidélité. Imaginer un autre enfant de son mari quelque part est souvent insupportable), les donneurs en Alsace sont de l'ordre de... 30. J'ai cru que j'allais tomber de ma chaise quand elle a donné les chiffres. 30. Et TOUS, sans exception, sont des proches de couples ayant eu des soucis de procréation. Effectivement, il est donc possible, voire extrêmement conseillé, de "parrainer" des hommes de son entourage et les encourager à aller faire un don au CECOS. Ce don n'est pas destiné au couple qui parraine, mais cela permet de réduire l'attente, et parallèlement, au CECOS de pouvoir augmenter les possibilités de dons aux couples stériles. Sauf que pour nous, dans la situation actuelle, c'est assez compliqué. Le frère de l'Homme n'a pas encore d'enfant. Je n'ai pas de nouvelles de mon propre frère depuis Noël... Alors je me vois mal le contacter en lui disant de revenir dans la région pour aller faire un don de sperme... J'en aurais presque ri si ce n'était pas si tragique...

Nous sommes donc repartis, avec notre dernier espoir d'enfant biologique foulé au pied et à jamais réduit à l'état de projet irréalisable. Nous sommes repartis avec un autre rendez-vous à la mi-juin, au CECOS de Strasbourg cette fois-ci, car, avec mon affection de longue durée, le protocole se fait à Strasbourg. Mais par chance, notre médecin de Mulhouse consulte également là-bas. Ça permettra d'avoir une seule interlocutrice, ce qui n'est pas négligeable en terme de gain de temps, car le temps, nous allons devoir courir après ! Ce prochain rendez-vous consistera en un nouvel entretien d'une heure. Apporter les pièces justificatives pour notre inscription officielle sur la liste des demandeurs. Même si c'est la date du rendez-vous initial qui sera pris en compte pour notre place sur la liste d'attente. Ça nous fait gagner 1 mois 1/2. Je sais également que j'aurai droit à mes premières prises de sang hormonales, afin de savoir si je vais subir une IAD (insémination artificielle avec sperme d'un donneur) ou une FIVD (Fécondation in-vitro avec sperme d'un donneur). Cela dépendra d'une hormone : l'AMH. La montée de cette hormone précède la montée d'une autre hormone qui marque l'entrée en ménopause. Je n'ai pas encore 40 ans, mais je n'ai plus que 2 ans 1/2. Le temps reste donc un facteur déterminant.

Sur le chemin du retour, l'Homme semblait perdu dans ses pensées. Les yeux toujours trop brillants, les doigts toujours trop serrés autour du volant. Il a suffit d'un touriste arrêté au milieu de la route pour qu'il explose. Un vrai feu d'artifice de colère, de tristesse, d'incompréhension et de rage noire. Il a hurlé sa peine. Il a frappé le volant de toutes ses forces, l'a secoué, faisant tanguer la voiture. Je l'ai forcé à s'arrêter sur le bas-côté. "Putain de vie de merde !!!!! A quoi ça sert tout ça !!! A rien ! Je pète un câble ma chérie, je pète un câble ! Que des rendez-vous ! Qui débouchent sur d'autres rendez-vous !!! J'étais tellement sûr d'en avoir envie et maintenant, je me dis que je n'y arriverai pas !!!!" Je l'ai laissé exprimer toute sa rage et son sentiment d'injustice. Je l'ai laissé douter à haute voix. Il avait besoin de cette explosion. J'ai eu très peur pour lui sur le coup. J'ai encore un peu peur pour lui. Même si depuis, il a retrouvé le sourire. Je sais qu'il y aura d'autres bas. Comment pourrait-il en être autrement, quand tu n'as plus d'espoir ? Ou disons plutôt, quand tu n'as plus cet espoir. Il faut laisser le temps au temps. Lui laisser le temps de se projeter dans une paternité désormais différente de ce qu'il avait imaginé. Ne pas l'étouffer avec la procédure. Le laisser être en colère quand il y a lieu de l'être. Etre là pour tendre son épaule. Offrir la paume de sa main à la caresse. Etre juste présente pour l'écouter, le rassurer, le consoler...

Dieu que c'est dur de continuer quand il n'y a plus d'espoir...